Le Plan Maroc Vert a été adopté en 2008 avec plusieurs objectifs à atteindre :
- Renforcer la part de l’agriculture dans le PIB du Maroc d’ici 2020.
- Lutter contre la précarité dans le milieu rural en favorisant l’emploi agricole
- Augmenter les revenus des agriculteurs
- Accroître la valeur des exportations agricoles vers le monde et enfin améliorer le niveau de sécurité alimentaire.
En 2016 on peut dire que le Royaume a atteint ses objectifs avec une augmentation de plus de 50% de la valeur ajoutée agricole, 48% de hausse des revenus des agriculteurs et 34% d’exportations agricoles supplémentaires.
La part de la population souffrant de malnutrition et de faim est estimé à 0,5% de la population, ce qui est largement négligeable. Son modèle agricole est désormais un exemple pour le continent africain qui avait délaissé l’agriculture au profit de l’industrialisation rapide. La diplomatie marocaine joue habilement la carte de la sécurité alimentaire pour gagner des alliés dans son continent après la désillusion de l’Union du Maghreb.
Secteur économique créant une force vertueuse avec 40% d’emplois et une contribution de 15% au PIB, l’agriculture retarde-t-elle l’industrialisation du pays et le passage à une économie développée ?
Le secteur agricole est soumis à des aléas climatiques intenses, en effet, sans pluies, la croissance économique se rétracte. 70% des terres cultivées au Maroc sont attribuées aux céréales, élément indispensable pour la nutrition. En somme, le PIB total du Maroc est totalement dépendant de la croissance agricole. La sécheresse de 2012 a eu un impact négatif sur l’économie avec une perte massive d’emplois et un taux de chômage qui avait augmenté.
La politique de la construction des grands et petits barrages a eu des effets limités sur l’irrigation. De ce fait, on considère que 13% des terres cultivées sont irriguées grâce aux barrages. La pluie joue donc un rôle clé dans la production agricole. Les usines de désalement d’eau de mer pourrait représenter un complément non-négligeable pour le stockage de l’eau au service de l’agriculture. De plus, le réchauffement climatique impose au ministère de l’agriculture de trouver des substituts ou des compléments aux barrages pour maintenir ses objectifs et préserver le rythme de l’économie nationale.
1 – La production céréalière explose :
Vu que le temps fut clément entre 2008 et 2013, et parce que les efforts de mécanisation, d’organisation et de financement réalisés dans le cadre du Plan Maroc Vert furent bien réels, la production de céréales a explosé. Elle devait augmenter de 45% à l’horizon 2020, mais elle a déjà atteint 9,7 millions de quintaux en 2013, soit 85% de plus qu’en 2008.
En 2008, la culture céréalière, dominante, monopolisait 75% des surfaces cultivées, contre 70% aujourd’hui mais elle représente uniquement 10 à 15% du CA du secteur.
On voit donc bien que l’objectif était donc alors d’augmenter fortement sa productivité pour produire plus, tout en diminuant les surfaces cultivées pour libérer de l’espace pour les cultures à forte valeur ajoutée.
L’arboriculture fruitière a augmenté de 70% et le maraîchage de seulement 15% alors que la production de la filière fruits et légumes doit augmenter de 280%, d’ici 2020. La production laitière n’a augmenté que de 22% pour un objectif de 131%.
Les agrumes, culture clé avec les tomates de l’agriculture marocaine, enregistrent une belle croissance : entre 66% et 77% de croissance depuis 2008, pour un objectif final de 146%. La production d’oliviers a également doublé sous les effets du Plan Maroc Vert.
Toutefois, le Maroc n’arrive pas à exporter la majorité de ses surplus vers son premier partenaire qu’est l’Union Europénne ? Serait-il pertinent de diversifier nos clients, malgré la distance géographique ? Tout porte à croire que oui, la Russie, l’Inde, le Brésil sont des marchés intéressants, à forte démographie et souvent soumis à des sanctions économiques, pénuries, chute de croissance etc.
Les productions à forte valeur ajoutée pour lesquels le Maroc dispose d’avantages comparatifs par rapport à ses partenaires commerciaux devaient pourtant être exportées selon la stratégie du Plan Maroc Vert. L’objectif in fine était d’importer les produits les plus consommés au Maroc et d’exporter en échange tomates et agrumes, dans le cadre des accords de libre échange.
2 – Le Maroc exporte-il autant que son potentiel d’exportation vers l’UE ?
Le Maroc est donc arrivé à produire 2,2 millions de tonnes mais devait exporter pour 1,3 millions de tonnes. Pourtant, en 2016, elle exporte près de 650.000 tonnes de produits agricoles vers l’UE, soit 50% de moins que son potentiel exportable.
Pour les producteurs marocains, il faut comprendre que vendre sur le marché local est beaucoup plus avantageux, ils sont payés immédiatement et n’ont pas à attendre des mois. Ensuite, le premier marché d’exportation du Maroc, l’Union européenne, a disposé des barrières non tarifaire – contingent et prix d’entrée – à l’entrée des produits extérieurs à l’Union comme les clémentines, les courgettes, les tomates, les haricots, qui sont justement les produits pour lesquels le Maroc dispose d’avantage comparatifs.
La réforme de la PAC a également instauré un prix plancher variable chaque jour, qui fait que le producteur marocain ne peut pas quotidiennement anticiper les variations de prix, son prix de vente et sa marge. En créant un marché plus incertain, l’UE arrive à limiter ses importations de produits agricoles de l’étranger pour protéger son secteur agricole qui souffre considérablement de la concurrence internationale.
Pour conclure, le Maroc est arrivé à satisfaire les besoins de son marché mais le potentiel à l’export est encore insuffisant et joue fortement sur le déficit commercial de la nation. Une renégociation des accords commerciaux ou une diversification des clients est sérieusement envisageable. Le Royaume doit également continuer à s’industrialiser pour ne pas tomber dans le piège de la mondialisation décrit dans notre article sur la politique industrielle : concurrence des pays à faible revenus et gap vis-à-vis des pays développés. Toutefois, le contexte historique qui avait mené au Protectorat (famines, guerres etc) démontre pourquoi le Maroc attache autant d’importance à sa sécurité alimentaire.