Selon David M. Hart, dans son livre « Tribu et société au Maroc rural », il décrit que Jusqu’à la montée récente du mouvement linguistique et culturel berbère en Algérie et au Maroc (dans le premier à partir de 1980 et dans le second seulement en 1991), un mouvement qui n’a été que très peu reconnu, si tant est par les gouvernements des deux pays, soucieux de ses implications politiques possibles, la plupart des observateurs l’avaient généralement assumée.
En incluant l’auteur actuel, le critère principal pour définir le terme « berbère » était le critère linguistique, et le berbère reste essentiellement une langue non écrite. Sur cette base, les locuteurs berbères du Maghreb (c’est-à-dire ceux qui parlent l’un de plusieurs dialectes berbères plutôt que l’arabe, qui est la langue nationale des deux pays, leur langue maternelle) auraient constitué environ 30% de la population de l’Algérie et environ 40 à 45% de celle du Maroc.
Il convient de noter d’abord que, conformément à la tendance qui prévaut dans le mouvement berbère, les Berbères ont tendance à se considérer eux-mêmes comme des Imazighen (Amazigh: le peuple libre), à leur langue en général comme le tamazight et au maghreb, en Afrique du nord, comme le tamazgha.
Deuxièmement, en ce qui concerne les pourcentages « traditionnels » que nous venons de citer, qui découlent en grande partie de la domination coloniale française, un certain nombre de points de vue ont été exprimés lors d’une conférence sur la culture berbère tenue en août 1994 à Douarnenez, en Bretagne, ces chiffres sont trop bas. En effet, un orateur, Ouzzine Ahardane, rédacteur en chef de l’hebdomadaire tamazight Tidmi, à Rabat, a même exprimé l’opinion que le pourcentage de locuteurs berbères devrait être supérieur à 50% et que, dans la période précoloniale, il serait inférieur à 50% jusqu’à 70-80%.
Ces dernières estimations modifiées en particulier doivent pour le moment rester hypothétiques; mais il ne fait aucun doute que le discours berbère, tel qu’il a été transmis en tant que mères berbérophones à leur progéniture, loin de s’éteindre (comme peut-être espéré par les nationalistes arabes), est évidemment en augmentation, tant dans les milieux ruraux qu’urbains du Maroc: ces derniers s’étaient en fait ouverts aux locuteurs berbères ruraux et tribalement organisés lorsque la «pacification» française des deux pays, achevée au Maroc seulement en 1934 – 22 ans après la mise en place du protectorat, avait été touchée.
La différence entre la situation berbère telle qu’elle se présentait en 1934 et celle d’aujourd’hui est que la majorité des hommes de langue berbère, du moins (bien que cela s’appliquerait beaucoup moins aux femmes), ne sont plus monolingues, même jusqu’à la fin du protectorat en 1956.