Le protectorat espagnol sur le nord du Maroc s’étendait de Larache (El-Araish) sur l’Atlantique à 48 km au-delà de Melilla (déjà une possession espagnole) sur la Méditerranée. La région montagneuse de langue tamazight avait souvent échappé au contrôle du sultan. L’Espagne a également reçu une bande de terre désertique au sud-ouest, appelée Tarfaya, adjacente au Sahara espagnol. En 1934, lorsque les Français occupèrent le sud du Maroc, les Espagnols prirent Ifni.
L’Espagne a nommé un khalifah, ou vice-roi, issu de la famille royale marocaine, au poste de chef de l’État et lui a fourni un gouvernement fantoche marocain. Cela a permis à l’Espagne de gérer ses affaires indépendamment de la zone française tout en préservant nominalement l’unité marocaine. Tanger, bien qu’il ait une population hispanophone de 40 000 habitants, a reçu une administration internationale spéciale régie par un mandoub ou un représentant du sultan. Bien que le mandoub ait été théoriquement nommé par le sultan, il a en réalité été choisi par les Français. En 1940, après la défaite de la France, les troupes espagnoles occupèrent Tanger, mais se retirèrent en 1945 après la victoire des Alliés.
La zone espagnole entoure les ports de Ceuta et Melilla, que l’Espagne détient depuis des siècles, et comprend les mines de fer des montagnes du Rif. Les Espagnols ont choisi Tétouan comme capitale. Comme dans la zone française, des départements à effectifs européens ont été créés, tandis que les districts ruraux ont été gérés par des interventeurs, correspondant aux contrôleurs civils français. La première zone à occuper se trouvait dans la plaine, face à l’Atlantique, qui comprenait les villes de Larache, Ksar el-Kebir et Asilah. Cette zone était le fief de l’ancien gouverneur marocain Amad al-Raisouni (Raisouli), moitié patriote et moitié brigand. Le gouvernement espagnol a eu du mal à tolérer son indépendance.
En mars 1913, al-Raisouni se retira dans un refuge dans les montagnes où il resta jusqu’à sa capture, douze ans plus tard, par un autre dirigeant marocain, Abdel-Krim.
Le reste de la période du protectorat espagnol a été relativement calme. Ainsi, en 1936, le général Francisco Franco put lancer son attaque contre la République espagnole depuis le Maroc et engager un grand nombre de volontaires marocains qui le servirent loyalement pendant la guerre civile espagnole.
Bien que les Espagnols aient moins de ressources que les Français, leur régime ultérieur a été à certains égards plus libéral et moins sujet à la discrimination ethnique. La langue d’enseignement dans les écoles était l’arabe plutôt que l’espagnol, et les étudiants marocains ont été encouragés à se rendre en Egypte pour suivre une éducation musulmane. Il n’ya eu aucune tentative de dresser les Amazighs contre les Arabes comme dans la zone française, mais c’est peut-être à cause de l’introduction du droit musulman par Abdel-Krim lui-même.
Ceuta, dans le détroit de Gibraltar, et Melilla, plus à l’est sur la côte méditerranéenne, continuent d’être des presidios espagnols sur le sol marocain, qui comptent tous deux une population majoritairement espagnole. En octobre 1978, les États-Unis ont cédé au Maroc une base militaire, la dernière en Afrique, à Kenitra.