La France exerce un protectorat sur le Maroc depuis la convention de Fès de 1912. À la gestion éclairée du général Hubert Lyautey, résident général auprès du sultan, a succédé en 1925 une administration beaucoup plus coercitive et timorée. Deux ans plus tard, le sultan Moulay Youssef meurt et laisse le trône à son troisième fils qui devient sultan sous le nom de Mohammed V.
Par le dahir berbère du 16 mai 1930 qui prétend détacher les tribus berbères du sultan, Paris laisse entrevoir sa volonté de remplacer le protectorat par une colonisation directe. Il s’ensuit des ferments de révolte nationaliste dans le pays. Le dahir est abandonné en 1934.
La situation se rétablit avec la nomination en 1936 du général Henri Noguès, disciple de Lyautey, comme résident général. Mais l’invasion de la France par les Allemands en 1940 puis, en 1942, le débarquement anglo-américain sur les côtes du Maroc redonnent de l’audace aux nationalistes marocains qui, en 1943, fondent le parti de l’Istiqlal (indépendance en arabe). Notons que dès 1941, le sultan s’est opposé à l’extension au Maroc des lois anti-juives appliquées en France et en Algérie.
Après la Seconde Guerre mondiale se multiplient les révoltes contre le protectorat à Rabat, Fès, Tanger… En dépit de celles-ci, les Français rejettent la revendication par le sultan d’une complète indépendance selon une promesse qui lui a été faite en 1943 par le président américain Franklin Roosevelt lui-même.
En désespoir de cause, Paris suscite contre le sultan la révolte de Thami El Glaoui, le pacha de Marrakech. Le samedi 23 décembre 1950, à l’occasion de la fête du Mouloud, celui-ci se rend au palais du sultan pour présenter ses voeux au Sultan Mohammed V et en profite pour le mettre en garde contre les fauteurs de désordre de l’Istiqlal. Irrité, le sultan le congédie. C’est la rupture.
Le Glaoui et ses partisans se proposent de déposer le sultan et de le remplacer par un vieillard, le chérif Mohammed ben Arafa. Mais dans le même temps,le sultan Mohammed V va de l’avant. Il entame la «grève du sceau» et refuse de signer les dahirs présentés par le résident général Alphonse Juin pour protester contre la tentative de celui-ci de transformer le Maroc en simple colonie. Le Glaoui lève une armée de milliers de cavaliers et marche sur Rabat et Fès.
Pour éviter l’irréparable, Mohammed V renonce à sa «grève» le 23 février 1951 mais sans que revienne la sérénité. Le 3 octobre 1951, le général Augustin Guillaume arrive à la résidence générale avec l’intention d’en découdre. Faute de pouvoir s’entendre avec lui, Mohammed V demande en novembre 1952, lors du discours du Trône, l’émancipation immédiate du Maroc. Le Glaoui et une vingtaine de caïds signent alors une pétition de dénonciation.
En août 1953, prenant prétexte de la révolte, le gouvernement français dépose le sultan et l’exile en Corse puis à Madagascar. Il le remplace sur le trône par Mohammed ben Arafa. Mais ces mauvais procédés n’ont d’autre effet que de grandir le prestige de Sidi Mohammed au sein de la population marocaine.
Contre l’avis de ses ministres gaullistes, le président du Conseil Edgar Faure engage deux ans plus tard des pourparlers avec le sultan. Une conférence s’ouvre à Aix-les-Bains le 22 août 1955. Elle aboutit à la signature d’un document par lequel la France reconnaît la fin du protectorat et l’indépendance du Maroc le 2 mars 1956.
Le souverain convertit son titre de sultan en celui de roi sous le nom de Mohammed V et le 7 mars 1956, annonce à son peuple le retour à l’indépendance.
L’Espagne à son tour reconnaît l’indépendance du pays le 7 avril 1956 avant de lui restituer un peu plus tard l’enclave d’Ifni et le littoral méditerranéen (à l’exception de Ceuta et Melilla). Enfin, le statut international de Tanger est aboli le 21 octobre de la même année et le grand port du nord retourne dans le giron du royaume.