Mohamed Badine El Yattioui, docteur en Science Politique de l’université de Lyon (France). Spécialiste des questions de sécurité globale et de gouvernance globale, il enseigne à la UDLAP (Universidad De Las Américas Puebla) au Mexique et à l’Université Jean Moulin Lyon III. Il préside le think-tank NejMaroc, Centre Marocain de Recherche sur la Globalisation qui publie une revue semestrielle et qui organise des événements dans différents pays et dirige le Séminaire Permanent sur le monde musulman (Observatorio sobre el mundo musulman) ILM.
Le jeudi 6 août, le Maroc a envoyé une aide d’urgence au Liban et a déployé un hôpital de campagne à Beyrouth, après les explosions qui ont eu lieu près de son port. Le Roi Mohammed VI a «donné ses instructions pour l’envoi d’une aide médicale et humanitaire d’urgence», composée de «médicaments de première urgence», de «produits alimentaires», de «tentes et couvertures pour l’hébergement des sinistrés» et de «matériel médical de prévention contre le Covid-19». De plus, le Souverain a présenté un «message de condoléances et de compassion» au président Michel Aoun.
Le Liban se trouve devant une impasse. La démission du gouvernement Diab et l’annonce d’élections anticipées ne semblent pas avoir d´impact sur la colère populaire. Les Libanais considèrent que ces explosions confirment la mauvaise gestion du pays. Rappelons que le système institutionnel est basée sur une répartition entre les confessions religieuses (présidence de la république pour les chrétiens maronites, primature pour les sunnites et présidence de l’assemblée pour les chiites).
Rappelons que le Maroc a eu une place importante dans les accords de Taëf en 1989. Membre du Comité tripartite (avec l’Algérie et l’Arabie Saoudite) qui a trouvé une médiation entre les acteurs de la guerre civile qui avait débuté en 1975. Le partage des pouvoirs sur une base confessionnelle est maintenu mais les pouvoirs du président de la République sont réduits au profit de ceux du chef du gouvernement. Les députés sont limités à 108, avec un nombre égal de députés chrétiens et musulmans.
Notons que la relation bilatérale est caractérisée par la faiblesse des échanges économiques. Le Maroc et le Liban ne sont pas de grands partenaires. Rabat n’assure que 1,6 % des importations agroalimentaires de Beyrouth, qui de son côté, n’envoie que 0,4 % de ses exportations vers le Royaume. Des efforts ont eu lieu afin d’y remédier mais sans résultats pour le moment.
D’un point de vue politique, le Hezbollah a refroidi les relations depuis 2018. La veille sécuritaire du Royaume au sujet de ce puissant parti libanais (du fait de sa proximité avec le Polisario via l’Iran) en est à l’origine. Priorité nationale oblige. D’ailleurs, cette crise a provoqué la rupture des relations diplomatiques entre le Maroc et le “parrain” du Hezbollah, l’Iran.