Mohamed Badine El Yattioui, docteur en Science Politique de l’université de Lyon (France). Spécialiste des questions de sécurité globale et de gouvernance globale, il enseigne à la UDLAP (Universidad De Las Américas Puebla) au Mexique et à l’Université Jean Moulin Lyon III. Il préside le think-tank NejMaroc, Centre Marocain de Recherche sur la Globalisation qui publie une revue semestrielle et qui organise des événements dans différents pays et dirige le Séminaire Permanent sur le monde musulman (Observatorio sobre el mundo musulman) ILM.
Lors de son discours prononcé l’an dernier, à l’occasion du 20ème anniversaire de la Fête du Trône, le Roi Mohammed VI souhaitait engager le Royaume dans « une nouvelle étape de développement modernisateur ». La conjoncture, marquée par le COVID et ses conséquences économiques et sociales, semble confirmer et accélérer ce processus.
Mercredi 29 juillet, lors de son discours, le Souverain a appelé le gouvernement à engager des réformes profondes, conscient des besoins du peuple marocain. Les principales hypothèses macroéconomiques (croissance, emploi) sur lesquelles s’appuie la loi de Finances 2020 vont être revues dans le cadre de la Loi de finances rectificative. Le Roi a insisté sur le fait que l’investissement public sera une des bases fondamentales de la relance économique. 120 Milliards de dirhams, soit 11% du PIB, seront injectés dans l’économie nationale, via la mise en place d’un Fonds d’investissement stratégique. Ce dernier devra prioriser les secteurs clés pour une relance rapide et efficace permettant notamment la création d’emplois et le développement d’activités à forte valeur ajoutée. L’austérité ne semble donc pas retenue. Le chef de l’Etat souhaite soutenir à la fois l’offre et la demande.
Il a également insisté sur la nécessité de moderniser le système de gouvernance du secteur public afin de le rendre plus efficace et plus efficient « pour corriger les dysfonctionnements structurels des établissements et des entreprises publics, garantir une complémentarité et une cohérence optimales entre leurs missions respectives ». Afin de les concrétiser, le Souverain a préconisé « la création d’une Agence Nationale dont la mission consistera à assurer la gestion stratégique des participations de l’État et à suivre la performance des établissements publics ».
Le Roi veut instaurer une culture du résultat au sein de l’administration publique afin de répondre aux attentes des citoyens. L’objectif est désormais de voir le pays se hisser au rang des pays émergents à travers une gouvernance plus efficace basée sur la reddition des comptes et l’évaluation régulière des politiques publiques. La justice sociale et une meilleure affectation des ressources budgétaires seront au cœur de cette ambition nouvelle.
La mise en place, à partir de janvier 2021 d’un plan d’action durant les cinq prochaines années, afin de permettre « la généralisation de l’Assurance Maladie Obligatoire (AMO) et des allocations familiales. Il sera ensuite étendu aux autres couvertures sociales que sont la retraite et l’indemnité pour perte d’emploi », démontre la priorité accordée à la question sociale par le Souverain. L’enjeu est de taille et pourrait permettre une réduction significative du secteur informel et la mise en place d’un nouveau contrat social. Le gouvernement et les partenaires sociaux devront faire preuve de pragmatisme afin de créer des mécanismes de gestion à la fois cohérents et efficaces.