#EditoDeMexico 72 : La monarchie et l’armée : radiographie d’une relation pas comme les autres

Mohamed Badine El Yattioui, docteur en Science Politique de l’université de Lyon (France). Spécialiste des questions de sécurité globale et de gouvernance globale, il enseigne à la UDLAP (Universidad De Las Américas Puebla) au Mexique et à l’Université Jean Moulin Lyon III. Il préside le think-tank NejMaroc, Centre Marocain de Recherche sur la Globalisation qui publie une revue semestrielle et qui organise des événements dans différents pays et dirige le Séminaire Permanent sur le monde musulman (Observatorio sobre el mundo musulman) ILM.

Hassan II a toujours eu une relation forte et complexe avec les militaires. Et ce avant même d’être Roi.

En avril 1956 (le Maroc vient d’obtenir son indépendance un mois avant) le Roi nomme son fils Moulay Hassan chef d’état-major des Forces armées royales, avant de le proclamer prince héritier le 9 juillet 1957.

Sa première intervention directe dans les affaires publiques du Maroc indépendant se produit en octobre 1958 lors d’un soulèvement dans le Rif. Assisté d’Oufkir, il mène une répression sanglante.

En 1961 il devient Roi après le décès de Mohammed V. Les émeutes de Casablanca, en 1965, se terminent dans le sang. Oufkir est à la manoeuvre. La conséquence directe : cinq ans d’état d’exception. Le parlement est suspendu. Hassan II dirige le pays main dans la main avec l’armée.

Les années 1970 seront bien différentes. Le danger viendra de l’armée. Le 10 juillet 1971, une tentative de coup d’Etat fait plus de cent morts au palais royal. Un an plus tard, le 16 août 1972, le général Oufkir organise l’attaque de l’avion du Roi. Oufkir se « suicide ». Par deux fois, Hassan II en réchappe par miracle.

En 1975, la Marche Verte lui permet d’unir le peuple et les partis derrière le Trône pour la cause nationale prioritaire : la récupération de son Sahara. Elle lui permet aussi d’éloigner l’armée et de l’engager dans une guerre qui durera jusqu’à 1991.

Redoutable stratège, Hassan II a su s’adapter et s’approprier « son » armée.

Aujourd’hui, la situation est bien différente. Le Roi Mohammed VI peut compter sur l’institution militaire en tant de crise sanitaire. Son allégeance à la monarchie est totale.