Mohamed Badine El Yattioui, docteur en Science Politique de l’université de Lyon (France). Spécialiste des questions de sécurité globale et de gouvernance globale, il enseigne à la UDLAP (Universidad De Las Américas Puebla) au Mexique et à l’Université Jean Moulin Lyon III. Il préside le think-tank NejMaroc, Centre Marocain de Recherche sur la Globalisation qui publie une revue semestrielle et qui organise des événements dans différents pays et dirige le Séminaire Permanent sur le monde musulman (Observatorio sobre el mundo musulman) ILM.
Depuis 2011, la situation au Sahel s’est aggravée et l’insécurité s’est étendue à la Libye. En réalité, depuis le début des années 2000 les forces de sécurité algériennes ont intensifié leur pression sur le GSPC et AQMI ce qui a poussé vers le sud, ces groupes armés qui ont commencé à déstabiliser le Sahel, profitant de la faiblesse des autorités locales.
Aujourd’hui, trois « zones » terroristes s’ouvrent, Une au nord de la Libye, où ISIS opère, une autre au sud dans le bassin du lac Tchad, où Boko Haram est basé, et une troisième au Mali, où il existe diverses organisations sous l’égide d’Al -Qaïda au Maghreb islamique. En raison du problème de sécurité régionale et de la faiblesse des acteurs locaux, l’Europe décide d’intervenir, avec les opérations Serval et Barkhane, coordonnées par la France. Malgré tout, les États du G5 Sahel (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad) font face à des faiblesses structurelles telles que la sécurité, la gouvernance institutionnelle et la politique économique.
Pour le Maroc, cela est inquiétant car ces groupes ignorent les frontières et déstabilisent toute la région sahélienne, et se rapprochent. Le Royaume utilise notamment l´arme de la diplomatie religieuse comme un instrument de son “soft power”. Les imams de ces pays sont formés, en grande partie, au Maroc. L’étude des questions de sécurité et de l’Etat de droit au Sahel nous fait remettre en cause plusieurs éléments importants. Surtout, la mise en œuvre régionale de tout type de politique n’est pas réalisable sans d’abord comprendre le contexte colonial et postcolonial de chaque entité qui compose le G5.
Il est clair que les défis actuels qui ont provoqué l’instabilité de la région ne peuvent pas être relevés de manière unidimensionnelle, ceci en raison de la faiblesse même des États. Des situations qui menacent l’Etat de droit telles que les frontières poreuses, l’évolution des groupes hybrides et des crises économiques et sociales.