#EditoDeMexico 65 : Quelle stratégie économique pour le Maroc ?

Mohamed Badine El Yattioui, docteur en Science Politique de l’université de Lyon (France). Spécialiste des questions de sécurité globale et de gouvernance globale, il enseigne à la UDLAP (Universidad De Las Américas Puebla) au Mexique et à l’Université Jean Moulin Lyon III. Il préside le think-tank NejMaroc, Centre Marocain de Recherche sur la Globalisation qui publie une revue semestrielle et qui organise des événements dans différents pays et dirige le Séminaire Permanent sur le monde musulman (Observatorio sobre el mundo musulman) ILM.

Selon le Haut Commissariat au Plan (HCP), durant le confinement, l’économie marocaine perdrait 8,9 points de croissance au deuxième trimestre 2020, contre 1,2 point au précédent. Il est donc urgent de définir des priorités en terme stratégique afin de sortir de cette situation complexe. Il faudra mener des efforts sectoriels sans oublier de maintenir une cohérence d´ensemble. Vaste programme !

L’impact sur l’économie marocaine à court terme (2020) risque de s’articuler autour de plusieurs enjeux. Avant la crise, l’économie marocaine était marquée par une dépendance aux stratégies des multinationales, un déficit commercial structurel et le poids de la rente et de l’informel. Désormais, le déficit public risque d’exploser. Se posera donc la question suivante : austérité ou relance?

La balance des paiements est elle aussi fragilisée car les transferts des MRE, les recettes touristiques et les IDE risquent de diminuer. La seule bonne nouvelle est la facture énergétique en baisse du fait de la chute du prix du baril de pétrole. Au second semestre 2020, les faillites, l´augmentation du chômage et un risque d´inflation seront à gérer. Le tourisme est l´un des secteurs les plus sinistré. Il faudra donc inciter fortement la demande intérieure.

Les défis à moyen et long terme pour le Maroc sont nombreux et difficiles. La consolidation d´un nouveau modèle de développement inclusif avec une politique de santé à (ré)inventer, la création de mécanismes de solidarité nationale, une politique de recherche et développement (R&D) à impulser. Cette dernière nécessite un partenariat fort entre État et secteur privé afin de diversifier la politique industrielle et permettre une montée en gamme au sein du commerce international afin de créer des emplois à haute valeur ajoutée. La compétitivité et la reconfiguration de la politique industrielle avec la promotion de « champions nationaux » sera aussi à prendre en compte. Encourager l’entreprenariat devient primordial également, afin de pouvoir compter sur un tissu économique solide (PME et TPE). Pour cela des outils tels que l’intelligence économique et l´intelligence territoriale sont à renforcer.

Enfin, il faudra réfléchir aux accords de libre-échange. Nombre d’entre eux nous sont défavorables car nous importons plus que nous exportons. Permettre aux industriels marocains de mieux se positionner sur le marché intérieur puis favoriser les exportations (vers l’Afrique principalement) devrait devenir une priorité.