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#EditoDeMexico 39: La recherche marocaine en Sciences Sociales et Sciences Humaines est en crise. Quelles solutions ?

Mohamed Badine El Yattioui, docteur en Science Politique de l’université de Lyon (France). Spécialiste des questions de sécurité globale et de gouvernance globale, il enseigne à la UDLAP (Universidad De Las Américas Puebla) au Mexique et à l’Université Jean Moulin Lyon III. Il préside le think-tank NejMaroc, Centre Marocain de Recherche sur la Globalisation qui publie une revue semestrielle et qui organise des événements dans différents pays et dirige le Séminaire Permanent sur le monde musulman (Observatorio sobre el mundo musulman) ILM. 

Alors que Driss Ouaouicha a été nommé ministre chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, la semaine dernière; le défi de la modernisation des universités publiques est devenu un enjeu majeur.

Le rapport annuel de la Cour des comptes, consacré à l´activité de 2018, aborde l’état de la recherche scientifique à l’université Mohammed V de Rabat. Le résultat est accablant et suscite de grandes inquiétudes quant à l’avenir de la recherche au Maroc. Cet éditorial se penchera plus particulièrement sur les Sciences Sociales et les Sciences Humaines (Histoire, Droit, Science Politique, Sociologie, Anthropologie et Philosophie).

La recherche scientifique en Sciences Sociales doit jouer un rôle central dans le développement économique et social du Royaume. Analyser les problèmes et proposer des solutions, mais également faire de la prospective afin d’anticiper les problèmes de demain.
Dans son dernier rapport, l’institution présidée par Driss Jettou constate que sur les 1200 publications dans des revues indexées produites par les chercheurs de l’université de la capitale durant l’année 2015, “seulement 4,09 % concernaient les sciences humaines et sociales”, ce qui signifie que la grande majorité des articles concerne les sciences dures, l’ingénierie et la médecine. La Cour des comptes explique ce phénomène préoccupant par trois causes principales.

La première est “le faible taux d’adhésion des enseignants chercheurs” aux structures internes consacrées à la recherche, préférant l’enseignement comme activité unique (souvent en cumulant avec le secteur privé). La deuxième concerne la faible participation aux revues indexées car les chercheurs marocains préfèrent les livres collectifs non référencés ou de simples journaux (ces deux dernières solutions ne permettant en aucun cas d’évaluer la qualité scientifique de leurs travaux). La troisième est relative aux doctorats de cette université, sur lesquels nous allons nous attarder.

Outre des problèmes de gouvernance (le centre d’études doctorales de la faculté de droit d’Agdal n’a tenu sa réunion qu’une seule fois, depuis sa création en 2008, alors que les textes en prévoient au moins deux par an), nous sommes en présence d´un taux d’abandon important (entre 35 % et 49 % des doctorants).

Désormais, nous tenterons de voir quelles solutions sont possibles et nécessaires.
L’absence de reconnaissance du statut de chercheur est un frein évident. La stratégie nationale pour le développement de la recherche scientifique à l’horizon 2025 prévoit d’instaurer un statut de chercheur pour les personnes qui font de la recherche dans des centres ou instituts , sans nécessairement être des enseignants-chercheurs sur le plan statutaire.

Plusieurs gouvernements ont tenté de le définir. Les doctorants, qui sont des chercheurs en cours de formation, doivent se voir reconnaitre ce statut. De plus le statut actuel de l’enseignant-chercheur est un véritable obstacle car l’ancienneté l’emporte sur le mérite, ce qui bride la productivité et la motivation. De plus, les indemnités de recherches représentent 50% de ce qu’il gagne alors que ce travail de recherche n’est pas évalué, ni en qualité ni en quantité.

Il manque également une définition des thèmes prioritaires liés aux besoins nationaux et des
lourdeurs administratives combinées à un manque de crédits évidents pour recruter des chercheurs marocains avec une expérience internationale. Les sciences humaines et sociales sont négligées et souffrent d’un manque de rigueur flagrant. Le principe de reddition des comptes doit donc jouer.

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